Les lieux-dits du pays foyen, I

Roquepiquet, Couronneau, La Grange Brûlée, Grosse Forge, Les Quatre Jambes et autres Vacants désignent les terres sur lesquelles des paysans ont passé leur vie et travaillé avant de reposer « aux tombes de leurs parents et amis ». Ce sont quelques uns des lieux-dits parmi les milliers que compte le pays foyen. Un nom de lieu exprime un peu de l’âme d’un terroir parce qu’il relie le paysan à la terre où il a passé sa vie, avec ses joies et ses peines.

    Un extrait de la carte de Cassini. Seuls les noms de hameaux figurent.

Des « lieux-dits » : les anciens n’écrivaient jamais ces noms, ils les prononçaient : « Demain, j’irai relever à la Rayre ». « Nous avons fauché le Pré des Dames », « aujourd’hui, je laboure au Claud », etc... A ces noms de lieux était associé le travail. Les gens du fisc, eux, les écrivaient, pour établir et lever l’impôt.

André Cayre cherchait cette vie d’autrefois et, quand elle ne s’imposait pas à lui, il l’imaginait. « Tu vois, me disait-il, Duras s’est édifiée sur une hauteur et, d’où que l’on vienne, on est obligé de monter une côte rude pour y arriver. Les jours de marché, les gens étaient chargés, et quand ils avaient gravi la côte, ils disaient : « c’est dur, ah… », c’est dur, ah, c’est Duras, et c’est ce qui a donné le nom de Duras ».

Ces propos, pour les savourer, il faut les entendre et non les lire. Mais dans les deux cas, ils nous renvoient à « La grammaire logique » de Jean-Paul Brisset, que Cayre ignorait.

André Cayre était paysan, autodidacte et collectionneur de tout ce qui illustrait l’histoire de « son » pays foyen : géologie, paléontologie, préhistoire, restes gaulois, gallo-romains, médiévaux, et jusqu’aux billets qui furent imprimés par la Banque de France pour l’expédition de Suez ! Il faisait visiter son Musée et, à chaque objet qu‘il montrait, il poursuivait un discours glorifiant l’homme dans son terroir.

    André Cayre dans son Musée, photo de Serge Roger parue dans Sud-Ouest du 6 septembre 1968.

J’avais rejeté cette étymologie de Duras mais j’avais bien senti que lorsque ces braves gens montaient la côte pour arriver au marché de la bourgade sans nom, il faisait très chaud !

André Cayre avait des vignes ici et là, à Pineuilh, à Saint-André-et-Appelles et à Saint-Géry. Comme tout paysan, il savait le nom de chacune de ses pièces ; il savait le type de culture qui leur convenait le mieux, le travail nécessaire pour obtenir la récolte et le revenu qu‘il devait en tirer. Dans le « dit » du lieu-dit, se cache cet incessant mouvement de la vie.

Aujourd’hui, il reste les noms de hameaux et de lieux habités : les Guignards, Martet, le Sablat, le Dry, les Majouans, Roquepiquet, Caville, La Moutine… Dans la commune de Ligueux, une vingtaine de noms ont subsisté alors que les vieux cadastres du 19^e siècle donnent 130 noms de lieux-dits, environ. Les noms des terres ont presque tous disparu. On a cessé de nommer la terre que l’on travaille. D'ailleurs, à partir du nom d’un lieu, qui irait imaginer son appropriation par l’homme, comme le faisait le père Cayre ?

    Carte de Ligueux, vers 1870. Elle ne donne que les noms de hameaux.

Combien trouverait-on de lieux-dit en pays foyen, noms de hameaux et noms de terres ? Deux mille, au moins, un ensemble considérable et qui apporterait bien des surprises. Mais quel travail ! Je vous en parlerai une autre fois.

Comments

[cigognier]

Je pourrai t'en citer quelques uns de lieux dits concernant mon quartier et dont certains ont une histoire (en vrac et dans le désordre : la guine, la crauze, gobineau, brayat, les beneytouts, la tapie {le plus grand en taille}......) On pourrait presque en faire un livre...

[vidareps]

signaler que cayre est l'auteur de la surcharge
philatelique de liberation premiere chronologique nationale sur 1fr50 petain brun..catalogues divers
" 4e republique ste foy"
mettre ici la photo d'une bande de cinq avec ses varietés d'impression.. chez Barat imprimeur..