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Le pays foyen
29 septembre 2007

Terre natale et terroir

camif1    Le battage à Saint-Nazaire vers 1880.

Il y a 50 ans, les élèves de l’école communale pouvaient ouvrir leur livre de lecture sur un texte d’Ernest Pérochon. L’écrivain vendéen montrait un vieil agriculteur qui sent venir la mort et demande à ses enfants de l’amener une dernière fois sur ses terres. Voici le vieillard installé sur une charrette ; il parcourt les terres qui furent toute sa vie et qui accueilleront bientôt son corps.

Cette ultime promenade illustre un des aspects de la mentalité de nos anciens : à la campagne, ils habitaient, travaillaient, avaient une vie sociale et prenaient leurs plaisirs dans un même petit terroir. Aujourd’hui, qui vit encore de cette manière ? Peut-être quelques agriculteurs qui travaillent une petite propriété autour de leur maison, et, selon la saison, se distraient en allant pêcher dans le ruisseau proche ou chasser dans le terroir environnant. Archaïsme ou confort de vie ? Posez-leur la question, il vous donneront leur point de vue.

Ce sont les derniers adeptes d’un style de vie très répandu jusqu’à la fin du 19e siècle. Il faut dire que pendant des siècles, l’ancien régime avait installé ce type de vie, jusqu’à l’inscrire dans les paysages. On ne trouvait aucune maison isolée. Ici et là, maisons, granges, appentis étables et parcs à cochons étaient groupées en hameaux, autour d’un puits ou d’une fontaine. Allez voir le hameau des Guignards, celui des Bournets, à Pineuilh, celui des Chapelains, à Saint-André et Appelles, celui des Merveillauds à Riocaud ou celui de Saint-Martial (anciennement les Blanchards), à Ligueux. Dans ce dernier, les dalles de bordure de la fontaine proviennent d’un beau calcaire blanc que l’on retrouve dans les motifs architecturaux Louis XV de la maison proche.

Les fontaines étaient un bien commun à tous les habitants du hameau. Pendant la Révolution, les paroisses furent transformées en “communes” et les fontaines devinrent des biens communaux, sauf la fontaine des Bournets que l’on oublia et qui est encore un bien commun des habitants de ce village.

camif1

Autour du hameau s’étendaient les terres que travaillaient ses habitants. On les appelait le “tènement”. Selon l’importance du hameau, la superficie du tènement variait entre 20 et 60 hectares.

Les lois de l’époque interdisaient qu’une maison soit abandonnée et qu’une terre cultivable ne soit pas travaillée. Ainsi, à Ligueux, vers 1500, plusieurs maisons du bourg étaient en ruine parce qu’elles avaient brûlé. Il fallut les reconstruire et les occuper. Dans le tènement, les bois fournissaient des bûches, des fagots et le tan que l’on tirait de l’écorce du chêne et qu’utilisaient les tanneurs de Sainte-Foy. Quand aux prairies, elles venaient naturellement dans les fonds humides des vallons ou sur les basses terres de la plaine facilement inondables. On y faisait pacager les bœufs et les vaches qui, pendant des siècles, furent les “moteurs” des activités agricoles.

La vie sociale était diverse et régulière : il y avait les assemblées capitulaires que les principaux habitants tenaient, le dimanche, après la messe, devant le porche de l’église. On y discutait des problèmes communs aux habitants de la paroisse et on prenait des décisions que, parfois, un notaire mettait par écrit. Il s’agissait des impôts, de la réfection du presbytère et de bien d’autres sujets. Ainsi, vers 1750, les habitants de Margueron refusèrent de verser la dîme sur les haricots, comme le demandait leur curé, sous prétexte qu’ils ne l’avaient jamais fait. Leur curé aimait-il la ségurnade ? Je l’ignore.

camif1    La foire de la Madeleine des Brandes vers 1880.

Les saisons s’écoulaient, marquées par les fêtes traditionnelles : les feux de la Saint-Jean, les taulades et autres gerbebaudes et, quand venait l’hiver, les veillées, chez soi ou chez ses voisins.

De génération en génération, chaque famille continua d’habiter dans son hameau, M. Guignard et ses descendants dans le hameau des Guignards, M. Bournet dans celui des Bournets, et on citerait tant de nom de familles, Coculet, Sivadon, Briand et autres, qui sont aussi des noms de hameaux.

Aujourd’hui, il est difficile de vivre, de travailler, d’avoir une vie sociale et de prendre ses plaisirs dans un même terroir. Mais le succès des fêtes, dans nos petits villages, montre que ce bon esprit des terroirs de jadis sait encore réunir les gens et les réjouir.

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