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Le pays foyen
11 octobre 2007

Images populaires en pays foyen

Aujourd’hui, les images nous submergent. Elles sont partout, sur la boite d’allumettes, les billets de banque, les journaux, etc... sans oublier la télé, les journaux et internet. Tant mieux, mon blog serait un peu austère sans illustrations.

Que furent les premières images, en pays foyen ? Que représentaient-elles, où se trouvaient-elles ? Je suis incapable d’apporter des réponses précises à ces questions.

camif21    Champfleury, qui avait publié une bonne « Histoire de l’imagerie populaire », en 1886, écrivait : « On trouve des monuments assyriens, on ne trouve pas l’image populaire, déchirée par les enfants, gâtée par le soleil, l’humidité, détruite avec les murs de la maison qu’on abat, et, qui pis est, méconnue trop souvent par ceux qui ont mission de la conserver ».

camif21    Lithographie chez Marotte, à Paris : "La Sainte-Famille". Au dos, le cachet de colportage.

Chez les brocanteurs ou dans les vide-greniers, vous aurez peut-être la chance de trouver quelques une de ces gravures qui furent populaires au début du 19e siècle. Sur certaines, vous verrez le cachet du colporteur à qui elles furent achetées. Ces gravures représentaient des thèmes à la mode : piété, légendes, amours, joyeusetés, événements politiques et militaires.

camif21    La légende a sauté au scannage. La voici : "Louis-Napoléon Bonaparte, élu Président de la République Française le 20 décembre 1848". Lithographie de la maison Bes & Dubreuil à Paris.

On accrochait ces images au mur. Je crois que lorsque le colporteur arrivait à intéresser un client, il lui vendait rarement plus d’une image. Je ne fais pas cette hypothèse sans raisons, et je vous les dirai plus loin.

Revenons à nos « images », tableaux, dessins, gravures, lithographies, photographies, cartes postales, etc... Voici quelques repères pour une histoire de l’image en pays foyen.

La plus ancienne mention d’images, à Sainte-Foy, figure dans un texte de 1565 qui cite « les mystères » que l’on représentait jadis au Sol de la Dîme. Ce lieu-dit se trouve à la sortie sud de la ville, dans l'actuelle commune de Pineuilh. L'endroit appartenait jadis aux moines de Conques. Le 3 décembre 1633, ceux-ci le donnèrent « au couvan des reverantz peres recordez » de Sainte-Foy, « par charité et pour l’amour de Dieu ». Rien ne permet de préciser l’époque de ces représentations. Furent-elles organisées par les moines de Conques ? Encore une question sans réponse... Voici le passage qui concerne les mystères joués au Sol de la Dîme : "Un endroict ou aultres foys avoyt este l'enfer d'une passion qu'on jouait en la ville du temps que les tenebres de l'antechrist le tenaient encore offusques". On a compris que ce texte fut rédigé par un protestant.

Si la forme de ces mystères respectait la tradition, ils étaient donnés dans des décors peints montrant le Paradis, l’Enfer, etc... Cette information illustre ce que l’on sait par ailleurs sur le développement presque exclusif de la peinture religieuse pendant des siècles. Les Archives municipales de Sainte-Foy conservent un inventaire de l’église établi le 17 novembre 1759 mentionnant deux tableaux.

Où ai-je lu que Giorgione fut le premier qui peignit des sujets non religieux ? Ce peintre italien vécut de 1477 à 1510. En pays foyen, l’apparition de peintures profanes n’est pas aussi ancienne. Dans les années 1750, tels nobles locaux demandèrent leur portrait à un peintre de passage qui souvent, ne signait pas son oeuvre. Le jeune atelier maçonnique de Sainte-Foy fit peindre un tableau de loge qu’il conserve toujours. Cependant, les colporteurs proposaient certainement leurs gravures et là, il s’agit bien d’images populaires ; mais je n’ai jamais vu ce type de gravures du 18e siècle en pays foyen.

Avec la fin du 18e siècle, nous tenons les premières images populaires, en pays foyen, dont nous soyons certains : les décors réalisés sur les plats, les assiettes et les pichets de la faïencerie Briand. Ils représentent un modeste bouquet de fleurs dans des tons vert et violet, ou une petite maison, entre deux arbres, dont la cheminée fume.

camif21     Un oiseau esquissé sur un tesson d'assiette de la faïencerie Brian (fin 18e siècle).

En pays foyen, la belle époque de l’image commença dans les années 1820.

camif21    "Sémire et Mélide", belle gravure coloriée à la main, 1799.

On accrochait au mur l’image achetée au colporteur. Ici, un sujet religieux, là, une amourette. Les hauts faits de Bonaparte devinrent à la mode. Avec les progrès de l’imprimerie, les illustrations apparurent dans les livres et les revues avant de les envahir. Fait remarquable, des écoles se mirent à dispenser des cours de dessin et de peinture, souvent au profit des jeunes filles de bonne famille. Je conserve quelques uns de ces dessins anciens réalisés dans les années 1840 par des élèves de l’école que les sœurs de Nevers tenaient à Sainte-Foy.

camif21    Une fine chromolithographie des années 1880.

Les progrès de l’imprimerie apportèrent une profusion d’images avec les chromolithographies, ces petites images en couleurs destinées aux enfants. Dans les années 1880, pour la première fois, une génération d’enfants fut élevée dans un bain d’images.

camif21    La Grand'rue vers 1860, une rare photo de Boursaus.

Le premier photographe de Sainte-Foy s’appelait Boursaus. Il exerça à partir des années 1860. Il tira le portrait de ses concitoyens aisés et fit peu de photographies de sa ville. A la même époque,

camif21    Cette gravure de Léo Drouyn représente la même rue en 1862.

Léo Drouyn fit plusieurs dessins de monuments anciens de Sainte-Foy. Avec quelques rares photographies anonymes, il s’agit des premières représentations faites de la bastide et de ses environs.

camif21    A la fin du 19e siècle, la diffusion de la carte postale accompagna l’essor de la photographie. L’imprimeur foyen Roquemaure publia les premières cartes postales de Sainte-Foy et de ses environs, entre 1898 et 1902 (dates à affiner, voir les cartes postales de Roquemaure dans les Albums). Astruc, de Bergerac, Guiller, de Libourne, Delboy, de Bordeaux, les Imprimeries réunies de Nancy, les foyens Curet, Gros, Ferbeyre et bien d’autres suivirent. La carte postale marqua un changement des habitudes et des mentalités. De la fin du 19e siècle à 1914, des centaines de cartes postales représentent tel aspect du pays foyen.

camif21     "Mille bises", signé "Vieille mère". Une belle carte postale coloriée de Gardonne.

On les utilisait pour correspondre avec le fils, soldat au Sénégal ou dans une autre colonie, avec un correspondant lointain ou avec une relation qui résidait dans une commune proche. La carte postale apportait les nouvelles de la famille ou un simple "Bonjour !". Le cercle des relations s’étendait dans l’espace et s’entretenait par des messages fréquents.

Cette profusion de cartes postales est un événement dont la portée n’a guère été mesurée. On ne se contentait plus de vivre ou de séjourner dans Sainte-Foy ou dans la campagne proche. Avec les cartes postales, on disposait d‘une multitude de représentations de son cadre de vie.

Des gravures de colporteurs aux cartes postales, la fonction des images populaires s’était diversifiée : symbole des opinions et des sentiments, élément de décoration, apport d’un témoignage ou d’une information visuelle, objet de distraction et de jeu.

Il y a longtemps que j’avais envie de noter les éléments que vous venez de lire. Ils ne constituent pas une histoire des images populaires en pays foyen, au plus, une trame. Cette histoire s’étend sur un peu plus de deux siècles : de la fin du 18e siècle à nos jours. Une autre fois, nous irons à la rencontre de ces petites gens qui, pendant des siècles, ont vécu sans posséder d’images et nous essayerons d’en trouver les raisons.

camif21    Images du Chocolat du Planteur, vers 1890. Bretagne, Environs de la Tour d'Elven. Normandie, environs de Trouville. Normandie, environs de Rouen.

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