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Le pays foyen
25 juillet 2018

Une école normale d'institutrice à Ste-Foy au 19ème siècle

En 1818, Madame Dupuy créa une école protestante pour jeunes filles. L’école était gratuite pour les indigentes. Le succès fut immédiat. La pédagogie était de type mutuel : les meilleures élèves étaient associées à l’enseignement et aidaient les enseignantes à s’occuper de leurs condisciples plus jeunes. 

 ecole-enseignemant-mutuel-2  image copiée sur le net.

 Wikipedia décrit le fonctionnement de ces institutions :

"Dans l’école mutuelle, l'organisation est totalement différente des méthodes d'enseignement simultané qui prévalaient alors : un seul maître est nécessaire pour faire fonctionner une école jusqu'aux limites d'ordre architectural concernant la capacité d'accueil du bâtiment (jusqu'à plus de 800 élèves). Ce système peut fonctionner à plusieurs étages, avec des moniteurs généraux, des moniteurs intermédiaires etc., jusqu'au niveau le plus bas des élèves débutants, tout le monde apprenant à son niveau et enseignant au niveau inférieur. Ainsi «Un enfant y trouve par définition toujours une place qui correspond à son niveau… Les moniteurs ne sont que provisoirement les premiers dans le précédent exercice de la même matière, et non pas les meilleurs élèves ou les plus âgés comme il sera de règle par la suite.

Le maître unique, juché sur son pupitre commande toute cette organisation, les élèves étant installés sur de longs pupitres mobiles, organisés en configuration variables suivant les matières et les groupes de niveau. La méthode introduit une innovation capitale : l'apprentissage concomitant de la lecture et de l'écriture, et fait appel à des outils pédagogiques encore peu usités, comme l'ardoise qui économise le papier ou les tableaux muraux autour desquels les groupes font cercle au moment prescrit.

Cette pédagogie active et coopérative fonctionne assez bien et permet d'apprendre à lire et à écrire en deux ans, au lieu des cinq ou six ans requis dans l'enseignement reposant sur la méthode en usage jusqu'alors".

Parler de discipline est peut-être anachronique parce que l'enfant était considéré comme un petit adulte et devait se tenir; il devait "obéir au doigt et à l'oeil". Aujourd'hui, qui connait cette expression, qui l'utilise encore ? Elle sera bientôt un archaïsme. Elle a pourtant son origine dans la discipline stricte des écoles mlutuelles.

L’école de Mme Dupuy fut l’une des premières, en Gironde, à pratiquer cette pédagogie d’un modernisme étonnant pour l’époque.

A partir des années 1830, les écoles se multiplièrent à Sainte-Foy. Le consistoire protestant et la fabrique catholique s'implantaient dans des terres neuves avec une ardeur que l'on n'imagine pas. Leur antagonisme habituel se doublait d'une stimulation renouvelée à chaque création d'écoles. Il y a quelques décennies, j'avais sauvé de la poubelle les écrits d'un diacre de la paroisse protestante, vers 1830 ; il disait la gnaque confessionnelle des uns et des autres pour occuper le terrain scolaire. De cette ambiance, je retiens trois éléments :

1 - La précarité des écoles. Souvent, elles ne comprenaient qu'une salle de classe, avec l'enseignant et peu d'élèves de même niveau ; avec plusieurs niveaux d'élèves, il s'agissait de classes surchargées et l'enseignant pratiquait la méthode simultanée. 

2 - La création d'institutions scolaires comprenant plusieurs classes avec comme exemples le collège protestant et l'école Anglade (catholique).

3 - La mise en oeuvre par les protestants de l'enseignement mutuel (le fameux enseignement lancastérien), avec les cas des écoles Dupuy (pour filles) et Mestre (pour garçons).  

Pour tous, ce fut le succès. Ainsi, en 1841, quelques jours après sa création, l’école des frères de la Doctrine Chrétienne comptait environ deux cents élèves. Une mutation sociale importante s’opérerait : à l’intégration sociale des enfants par le travail, en famille ou en apprentissage, s'ajoutait celle qu'apportait la scolarisation.

En 1828, l’école Dupuy devint une école formant des institutrices. Jusqu’à sa fermeture, vers 1883 elle fut « une pépinière d’institutrices ». Des jeunes filles venaient de l'Europe occidentale. Une jeune parente d'Aristide Boucicaut donne l'exemple de ces demoiselles de familles aisées voire riches qui passèrent leur scolarité à Ste-Foy dans cette pépinière d'institutrices.

 

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Dans l'album d'Adelaïde Baylet, commencé le 1er juillet 1876.

Madame Dupuy et Madame Delhorbe, qui lui succéda, répondaient aux demandes de tels pasteurs et plaçaient les institutrices qu'elles avaient formées en France (Provence, Alpes, régions de Bordeaux, Montauban, Stasbourg, etc.), et dans des pays voisins (Angleterre, Belgique, Allemagne, etc.).  

En 1852, Mme Delhorbe prit la direction de l’école. Cette protestante évangélique donna à ses élèves une excellente éducation religieuse. Elle fut en contact avec de nombreux pasteurs et des personnalités du monde protestant, en France, en Suisse, en Allemagne, en Grande Bretagne et aux Etats-Unis. Les élèves venaient de ces pays, de France avant tout, et y trouvaient un poste, munies d'un diplôme d'institutrice. En 1877, Mme Delhorbe estima que son école avait formé près de 500 institutrices.

On garde l’impression que le rayonnement de l’école fut extraordinaire. En particulier, les contacts entretenus par Mme Delhorbe avec les évangéliques suisses incitèrent beaucoup de familles suisses à envoyer leurs filles dans son école. Certaines familles suisse s’installent à Sainte-Foy et dans ses environs.

Mme Delhorbe consacra sa vie à son école. Quand elle fut en âge de prendre sa retraite, les lois Ferry modifiaient la donne scolaire en France. Peut-être que Mme Delhorbe ne put pas s’y adapter. En tous cas, elle ne trouva personne pour lui succéder et cette école, qui fut prestigieuse, ferma vers 1883.

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